Tendances & mode de vie

Coffee Shops : les brasseries 2.0

Les années 90 aux Etats-Unis ont contribué à la diffusion de la culture café via des lieux « cool » : les Coffee Shop. A l’arrivée des premiers Starbucks en France, on a douté de leur succès. La raison ? Comment imposer ce modèle face à la culture bien ancrée du Bistrot et de la Brasserie.

Qui n’a pas en tête ces images de Friends mettant en vedette un personnage à lui seul : le « Central Perk » où se réunissaient les héros de la série ? Les amis, l’ambiance, les mugs et les discussions ont ponctué durant des années les scènes de la vie quotidienne de Ross, Monica, Chandler et les autres. Véhiculée durant de longues années, cette occurrence télévisuelle a forgé l’image décontractée d’une jeunesse urbaine, cultivée et socialisée. A l’Américaine, en somme, et avec le talent qu’ont les Américains pour exporter leurs modèles. Le succès des Coffee Shops des années 90 s’est fait dans la foulée de cette médiatisation. Et pas forcément en misant sur la qualité du café. Avec le recul et deux décennies de développement du Café de Spécialité, on en est quasiment certain aujourd’hui.

Ce qui fait que l’attraction de l’expérience sociale a semblé prévaloir jusque-là. Le modèle Starbucks s’est imposé sur le sol américain. Pour autant, son exportation en France en a-t-elle été aussi aisée qu’outre-Atlantique ?

 

Une difficile adaptation…

On le voit bien, les Coffee Shops drainent une image chaleureuse, l’ambiance y est détendue et aussi studieuse. Le développement d’une certaine forme de mobilité professionnelle prend corps. Il s’appuie sur deux piliers clés. L’avènement des ordinateurs portables d’un côté et l’arrivée du service d’accès gratuit au WIFI de l’autre.  La conjonction des deux tendances constitue l’attrait de ces nouveaux lieux. Et le phénomène tranche avec ce qui est en vigueur en France. Les brasseries ne veulent pas rompre avec la force de la tradition : l’expresso, la terrasse, le service assuré par un serveur en grande tenue.

On comprend mieux la crispation qu’a généré l’accès au WIFI gratuit. Les consommateurs aspirant à prendre le train de la modernité en marche, les patrons de brasseries arcboutés sur le modèle qui fait la réputation de notre art de vivre.

Les clients concernés par ces nouvelles habitudes de consommation sont pour beaucoup des étudiants qui préfèrent s’installer dans un cadre agréable, dépourvu de fumée de cigarette et potentiellement lieu de rendez-vous professionnel ou personnel. La France devient alors le pays d’une opposition de style que n’a pas forcément connu l’Italie. En effet, le pays du ristretto avait peut-être déjà enclenché sa mue culturelle, notamment grâce l’espresso bar. Le concept simple avait pourtant été une source d’inspiration forte pour Howard Schultz, le fondateur de Starbucks. D’un voyage en Italie dans les années 80, il importa l’idée de ces lieux de consommation du café et de ses différentes déclinaisons.

 

… et pourtant

Le déploiement mondial de la marque se heurte tout de même à la puissance de la culture. La France est un pays de café, certes, mais à sa façon. C’est aussi son charme.

Il faut peut-être attendre la deuxième partie de la décennie 2000-2010 pour que la situation se débloque vraiment. Les premières ouvertures de Coffee Shops dédiés au Café de Spécialité bouscule un fait qu’avait établi Starbucks jusque-là : un café sans un vrai bon café à boire.

C’est sur ce dernier point que les néo Coffee Shops vont bâtir leur stratégie. Mettre l’accent sur la qualité tout en conservant l’idée d’un endroit attrayant. Côté prix, le positionnement est similaire à ce qui se pratique dans les salons Starbucks.

C’est souvent à la faveur d’un voyage à l’étranger (Etats-Unis, Australie ou Nouvelle Zélande) que les entrepreneurs du Café de Spécialité lancent leur activité de Coffee Shop en France. Commerces de proximité capables de générer de l’emploi, parfois non qualifié (c’était le cas au début), ils constituent un repère sociologique totalement nouveau : philosophie de vie, plaisir du métier, ouverture d’esprit, multilinguisme, conscience écologique…

Le phénomène fait mouche. D’autant que le métier de barista se prête avec bonheur au phénomène des réseaux sociaux. La France ne fait donc plus exception.

La tradition de la brasserie française telle qu’on l’aime existe et existera sans doute toujours. En parallèle, s’est développée une alternative, celle des Coffee Shops où il est question d’origines, de variétés, de process et de méthodes d’extraction. Aux acteurs de cette nouvelle ère de créer leur propre tradition.

 

Starbucks et son évolution

Création en 1971 par Howard Schultz

Situé sur le marché de Pike Market à Seattle, au début, il ne s’agit que d’un comptoir distribuant du café et du thé.

Le fondateur quitte Starbucks et part la découverte du café en Europe. Son passage en Italie est révélateur et l’inspire pour la suite. Milieu des années 80, il revient aux Etats-Unis et fonde « Il Giornale », un concept d’espresso bar. En 1987, il reprend Starbucks et lance à grande échelle ses salons de café.

Environ 15 000 Starbucks sont présents dans 50 pays, dont 800 points de vente à Seattle.

2015 : Ouverture de Réserve Starbucks, le concept de Café de Spécialité de Starbucks.