Histoires et interviews

Noa Berger – Sociologue du Café

Au cours de ses études à l’EHESS* (Paris), Noa s’est penchée sur la question du café n’hésitant pas à vivre sa propre expérience café au Brésil. Elle anime la communauté du Café de Spécialité et les réseaux sociaux en apportant ses observations autour du café. Nous l’avons interrogée, notamment sur une question simple, mais loin d’être anodine : Single origine ou Assemblage ?

 

Coffee Lounge : Noa, vous vous êtes réinstallée à Tel Aviv après 7 années passées en France. C’est l’occasion de nous faire un point sur le café en Israël.

Noa Berger : Israël est un pays de café. Le fait que l’on m’invite sur les plateaux de télévision pour parler de son évolution lors des Journaux du soir en est une illustration.

Le pays bénéficie aussi d’une situation géographique qui favorise les multiples influences où l’on retrouve des traces d’Italie, d’Empire ottoman et d’Arabie. De plus, je crois vraiment qu’ici il y a un intérêt très puissant en faveur de la gastronomie. Le café fait vraiment partie de cette  industrie.

 

Coffee Lounge : On constate, ici et là, une explosion du Café de Spécialité. Le phénomène est-il aussi perceptible et de quelle manière prend-il forme en Israël ?

Noa Berger : C’est un fait que l’on constate également dans le pays. Bien entendu, il est essentiellement urbain et très présent dans la capitale culturelle : Tel Aviv. Finalement, le maillage y est intéressant puisque chaque quartier a son représentant. Et, comme la plupart des professionnels du Café de Spécialité, la création d’un Coffee Shop ou d’une torréfaction intervient suite à un voyage réalisé aux Etats-Unis ou en Australie. Le retour de savoir peut alors se mettre en marche.

 

Coffee Lounge : Après ce point sur le café en Israël, essayons d’en savoir davantage sur un sujet qui attire votre attention. Single origine ou Assemblage ?

Noa Berger : Dans le cadre de mon travail qui consiste à apporter des éclairages multiples sur le café, c’est une discussion que j’ai notamment lancé en proposant à Veronica Belchior (agronome et Q-Grader) installée au Brésil et Mihaela Iordache (responsable de la torréfaction pour Brûlerie Belleville). Cela permettait de confronter plusieurs points de vue : le premier venant d’un pays producteur, le second d’une expérience de torréfaction menée, justement, sur le principe de l’assemblage.

 

Coffee Lounge : Que ressort-il de ces discussions que vous avez eues ?

Noa Berger : Déjà, le sujet est très intéressant en soi. Il permet d’approcher la question de l’Assemblage en prenant de la hauteur. Autant sur la définition de départ du café « Single origine » que sur les idées reçues concernant le « blend ».

Au Brésil, par exemple, le principe de « Single Origin » ne va pas forcément se limiter à une région. Selon Veronica Belchior, cette notion peut être affiner jusqu’à la ferme et même une parcelle de celle-ci…

 

Coffee Lounge : Et pour le sujet de l’Assemblage ?

Noa Berger : De l’expérience que mène Mihaela Iordache depuis plusieurs années, cette approche va à l’encontre de bien des lieux communs en matière de torréfaction. Chez Brûlerie Belleville, l’Assemblage est une marque de fabrique qui offre l’opportunité à chaque café de s’épanouir dans une association dont le but est de révéler un tout.

Il faut bien admettre que le « blend » est resté, dans l’esprit des gens de la profession, un moyen de camoufler des défauts voire de gagner de l’argent. Alors que l’enjeu est vraiment ailleurs.

 

Coffee Lounge : C’est-à-dire ?

Noa Berger : Disons que la question se pose aussi dans ces termes : Quelle est la place du « blend » et quelles sont les perspectives qui s’ouvrent à cette pratique aujourd’hui ?

Il y a bien une idée de rendre le café plus démocratique et gommer peu à peu une certaine forme de snobisme. Car l’Assemblage est aussi un excellent moyen d’assurer de la consistance et de rendre l’accès au bon café plus simple. Tout en garantissant une plus grande transparence quant aux pratiques de sa « supply chain ».

 

Coffee Lounge : Le choix entre « Single Origine » ou « Blend » ne devrait donc pas créer le clivage que l’on connaît…

Noa Berger : Il y aura toujours le débat avec son point de vue sociologique. D’un côté, l’Assemblage : pour ou contre. Et en face, l’origine : pour ou contre.

Mais on préfère quand même considérer que le Blend permet de valoriser le travail de l’artisan-torréfacteur et même de marquer le marché de son empreinte.

 

 

Coffee Lounge : La pratique du « Blend » est aussi culturelle, n’est-ce pass ?

Noa Berger : C’est certainement vrai. Il faut sans doute prendre escompte l’approche géopolitique du café qui a permis des approvisionnements et des manières de faire et de consommer induites par ces situation. On remarque par exemple, que dès les années 1920, le café aux Etats-Unis s’est propagé grâce à un accès facilité aux productions brésiliennes. C’est sans doute ce qui a favorisé aussi quelques années plus tard le déploiement du café soluble qui a pour origine le Brésil.

On peut transposer l’analyse au cas du café en France dont les colonies en Afrique de l’Ouest ont leur influence dans la propagation des mélanges Arabica/Robusta.

 

 

Coffee Lounge : A propos de culture, revenons pour terminer à Israël, quelles sont les préférences de consommation du café ?

Noa Berger : Déjà, il n’y a pas de snobisme autour du Café de Spécialité, sans aucun jugement de valeur. On admet tous les styles de torréfaction. Même si la tendance est de pousser la cuisson vers le sombre. Cette ouverture d’esprit se traduit par une diversité des gammes et de l’offre. Nous constatons une culture du Coffee Shop qui mêle à la fois consommation sur place et à emporter. Nous n’envisageons pas le Coffee Shop sans rien à manger.

 

 

Coffee Lounge: Et côté café, vous expliquiez être un carrefour de rencontres. Comment cela se traduit-il ?

Noa Berger : Ah oui… c’est le café noir à la cardamome qui domine ici. Et puis, on peut goûter au café yéménite (Khamaneje) et même à certains endroits, assister au rituel du café à l’Ethiopienne. Par ailleurs, peu de capsules sont en circulation, ceci étant dû à notre conscience écologique.

 

 

*Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

 

 

 

 

 

Exergues

 

L’Assemblage est aussi un excellent moyen d’assurer de la consistance et de rendre l’accès au bon café plus simple

 

Il n’y a pas de snobisme autour du Café de Spécialité, sans aucun jugement de valeur.

 

C’est le café noir à la cardamome qui domine ici

 

 

Pratiques

 

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