Histoires et interviews

Dans la peau des candidats au MOF*

Le Coffee Lounge fait un focus sur le Meilleur Ouvrier de France – Torréfaction. 12 candidats, 6 épreuves de haut niveau constituaient le plateau de la finale du concours qui a eu lieu cette année à Limoges (Lycée hôtelier). Nous avons rencontré Anne Caron, Mikaël Portannier et Laurent Baysse**, trois de ces finalistes passionnés. Interview croisée.

Le Coffee Lounge : Comment avez-vous vécu votre expérience de finaliste au concours de MOF ?

Anne Caron : J’ai adoré ! Nous nous sommes retrouvés tous ensemble, 12 finalistes, pour passer le concours de MOF, c’est vrai. Mais je retiens surtout une atmosphère et une ambiance bienveillante. Nous étions aussi là pour nous encourager les uns les autres tout en essayant de rester concentrés sur nos objectifs respectifs.

De façon plus personnelle, le fait que la finale se déroule à Limoges ravive des souvenirs puisqu’il y a 20 ans, j’étais déjà là pour participer à la certification des Cafés Errel.

 

Mikaël Portannier : Je retiens pour ma part une première chose : l’émotion particulière d’avoir été sélectionné en finale. C’est une ambiance particulière, mais ô combien bonne. Sûrement parce que nous nous connaissons tous. A ce titre, nous ne sommes pas dans une compétition au sens le plus fort du terme, j’estime avoir été davantage confronté à moi-même qu’aux autres. D’ailleurs, il y avait un esprit d’entraide, de transmission et de partage qui a infusé durant tout le concours.

A la fin, je suis ressorti en étant satisfait à 70%, sachant qu’il y a toujours des doutes sur ce que nous avons produit. On s’aperçoit, tout en passant le MOF, que l’on apprend constamment.

 

Laurent Baysse : C’est beaucoup de stress à gérer. J’ai le souvenir notamment d’avoir été à la limite parce que la maquette de l’œuvre à présenter au concours est arrivée la veille des épreuves. Ensuite, je retiens une attente entre les épreuves qui peuvent pour effet de nous sortir de notre objectif et constitue une épreuve en soi. Sinon, le plaisir est total parce qu’on y rencontre des torréfacteurs fabuleux avec qui l’on partage.

 

Le Coffee Lounge : Sur les 6 épreuves proposées par l’organisateur, laquelle vous a-t-elle paru la plus difficile ?

 

Mikaël Portannier : La triangulaire… C’est-à-dire le cupping où nous avions à identifier l’intrus des trois cafés présentés sur la table. J’ai pourtant l’habitude, dans le cadre de mon travail de formateur, de goûter beaucoup et souvent. Mais je crois bien qu’il s’agissant de la plus difficile dégustation que j’ai eu à faire. Il y avait quatre triangles que nous devions déguster en 15 minutes. Mais la similitude entre les cafés était telle que j’avoue avoir hésité et douté, me demandant longtemps après l’épreuve ce que j’avais réalisé.

 

Laurent Baysse : C’est peut-être la mise en situation professionnelle devant trois professionnels et le président du jury incarnant des membres d’un service achats d’un établissement gastronomique. Le besoin était le suivant : concevoir une offre pour la partie restauration, mais aussi petit-déjeuner de la structure. Il fallait valoriser la notion de Café de Spécialité tout en étant convaincant. L’enjeu : apporter une solution à une problématique posée.

 

Anne Caron : Je pense instantanément à la partie torréfaction pour la raison suivante : la maîtrise du torréfacteur. Nous avons évolué sur un Phœnix Roaster 5kg (équipement français) qui a la particularité d’être doté d’une grande puissance. La session d’entraînement a été très bénéfique en ce sens pour s’habituer à la machine. Il se trouve que la température monte vite et haut, il fallait donc anticiper pour la baisse de chauffe.

 

 

Le Coffee Lounge : Deux, trois origines ou plus… Lors de l’épreuve de torréfaction, vous devez créer un assemblage. Avec quelles origines et combien l’avez-vous conçu ?

 

Laurent Baysse : J’ai choisi trois origines… en me positionnant sur des process Nature et Honey. On a de nombreuses origines à notre disposition que l’on découvre dès notre arrivée au concours. De mon côté, j’ai fait le choix d’un Costa Rica et Honduras (les deux en Honey) que j’ai associé à un Myanmar (Nature). Après extraction en expresso, cela a donné une tasse au nez avec une belle caramélisation et des notes de pain grillé toasté. La présence d’acidité s’est confirmée avec la longueur en bouche.

Lors de l’épreuve, la difficulté a été de gérer une extraction alors que le café était en pleine phase de dégazage… Mais cela faisait partie du jeu.

 

Mikaël Portannier :  Pour aborder mon assemblage, j’ai d’abord bien regardé les grains de chaque origine et examiné les informations présentes sur les sacs de café vert. Certains remontaient à plus d’un an. Aussi, pour ne pas prendre de risque avec des cafés expérimentaux, je voulais créer une base solide avec des cafés lavés qui sont plus stables avec le temps. Au final, cela a donné un Pérou et un Salvador (les deux lavés) et un Ethiopie Nature. J’ai obtenu ce que je voulais : des notes chocolatées et fruitées, avec du corps et une texture soyeuse. C’était assez réussi malgré le dégazage en cours qui n’a pas trop fait pétiller le café.

 

Anne Caron : Je n’ai pas voulu prendre de risque. J’avais repéré un Costa Rica (process Nature) qui est une origine que je connais globalement bien en temps normal. Je l’ai assemblé avec une seule autre origine : Myanmar (Honey). Mon intention était de créer un assemblage tout en sucrosité et épicé. Mais je souhaitais aussi développer des notes chocolatées avec du corps. Pour cela, je me suis concentrée sur le temps de développement (2’30) lors de la torréfaction. Lors de l’extraction, il faut justifier ce que l’on a obtenu en tasse, j’avais bien ce chocolat intense et de la rondeur !

 

Le Coffee Lounge : Au fond de vous, quelle est l’épreuve qui vous laisse avec une émotion particulièrement présente ?

 

Anne Caron : Si je dois en désigner une… ce serait la mise en situation professionnelle. Parce que j’adore vendre ! Et le faire dans le cadre d’une étude de cas complexe comme celui qui nous a été présenté lors du concours m’enthousiasme. Ce sont 20 minutes d’échanges intenses avec les membres du jury qui jouaient le rôle d’acheteurs d’un complexe hôtelier a été enthousiasmant. Je suis ressortie en me disant que je leur ai vendu mes solutions. C’est une situation que j’affectionne.

 

Laurent Baysse : Je pense à la présentation de la maquette de l’œuvre dont la thématique était d’imaginer une solution mobile de torréfaction avec une dimension Développement Durable.

Il fallait défendre sa création en présentant un Business Plan car le projet doit être réaliste commercialement. J’ai alors présenté « Plaisir », un truck qui embarque un atelier complet de torréfaction miniature me permettant d’aller à la rencontre du public pour lui vendre du café, mais aussi proposer des animations et démonstrations de torréfaction. J’étais particulièrement fier de mon olfactorium inclus dans les équipements du truck.

 

Mikaël Portannier : Beaucoup de moments me reviennent, mais je vais parler de « Texture », soit le nom du concept de maquette que j’ai défendu pendant 45 minutes devant le jury. Cela a été beaucoup de plaisir. Il s’agit finalement d’un meuble sur roulettes simples, contenant un atelier complet miniature de torréfaction. Cet équipement a pour vocation d’être un outil promotionnel d’une entreprise de torréfaction. En quoi consiste le projet ? Découvrir le plaisir du café par des textures juteuse, soyeuse ou sirupeuse. Double objectif : toucher le grand public et permettre aux marques partenaires de s’approprier l’outil pour apporter du contenu auprès des consommateurs. C’est un moment que j’ai apprécié parce qu’à chaque question, il y avait une réponse à apporter.

 

 

*Meilleur Ouvrier de France (Torréfaction)

 

** Anne Caron (Cafés Caron), Mikaël Portannier (Café Lomi) et Laurent Baysse (Brûlerie du Cantin)

 

 

 

Exergues

 

« Nous étions aussi là pour nous encourager les uns les autres tout en essayant de rester concentrés sur nos objectifs respectifs » Anne Caron

 

« On s’aperçoit, tout en passant le MOF, que l’on apprend constamment » Mikaël Portannier

 

« Pour l’assemblage, j’ai choisi trois origines… en me positionnant sur des process Nature et Honey » Laurent Baysse

 

 

Encadré

Les 6 épreuves composant la finale du MOF – Torréfaction

Présentation de l’œuvre ou de la maquette : 45mn devant un jury avec évocation d’un Business Plan.

Triangulaire dégustation : 15 mn pour déguster 4 triangles de cafés desquels il faut exclure la tasse incluse.

Torréfaction : 60 minutes en tout pour torréfier et reproduire une colorimétrie + un assemblage à partir des origines sourcées par les organisateurs

Une extraction en expresso de l’assemblage réalisé : 15mn pour préparer un expresso à partir du café torréfié par le candidat (4 expressos à préparer).

Un reconnaissance des cafés verts : 15 mn pour reconnaître et identifier 10 cafés verts

Une mise en situation professionnelle : 10mn de préparation et 20mn de questions-réponses avec le jury sur un sujet que le candidat découvre au dernier moment.

 

 

Pratique

Aller à la rencontre de ces trois candidats

Café Caron : www.cafecaron.com

Café Lomi : https://lomi.cafe

Brûlerie du Cantin : www.brulerieducantin.com

 

 

 

Crédits photos

 

Anne Caron par Brûlerie Caron

 

Laurent Baysse par French Coffee Production

 

Mof générique par Sylvain Robin

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