Tendances & mode de vie

Agro-foresterie : vertus d’une agriculture traditionnelle et moderne

Le temps des pratiques agricoles plein soleil est révolu. La tendance plaide aujourd’hui pour une production de café sous ombrage. Quels sont les enjeux des cafés de forêts ?

Les grandes étendues de caféiers exposés aux rigueurs d’un soleil sans pitié ont vécu. Ce modèle a traversé plusieurs générations de producteurs et concerne encore de nombreux pays. Mais l’argument du rendement et de l’intensif à tout crin au détriment du respect des environnements (géographique et social) s’enlise. Un front s’organise pour une agriculture plus responsable, attentionnée à tous niveaux à commencer par les caféiers, les sols et les populations. Il réunit de plus en plus de torréfacteurs du Café de Spécialité, d’importateurs et dans leurs sillage, des Coffee Shops et leurs clients. C’est désormais la raison d’être de Terres de Café et Christophe Servell : « J’ai découvert les cafés de forêt en Ethiopie il y a 10 ans et mon sourcing repose exclusivement sur cette pratique. C’est mon engagement ! ». Il le partage avec ses clients et de plus en plus de consommateurs y adhèrent. Il cristallise de nombreuses vertus longtemps ignorées depuis la fin des années 1960 avec l’explosion de la consommation de café mondiale à laquelle il a bien fallu répondre. En optant notamment pour une agriculture de rendement immédiat qui a entraîné une large déforestation des zones caféières. 

Le changement climatique, l’augmentation des coûts de production, la pression sur les prix d’achat aux producteurs appellent à changer la donne. « Mais comment la mettre en musique si l’agro-foresterie n’est pas prise sérieusement en considération, les investissements pourraient se reporter sur d’autres programmes  ? » questionne Todd Rosenstock (Agroecologiste au World Agroforestry Center). Si une part de la responsabilité est portée par les professionnels, l’autre incombe à toutes les autorités locales et internationales. 

 

De vrais bienfaits

Un changement de pratiques agricoles en reboisant n’aura pas d’effet immédiat. Il faut patienter au minimum 5 ans pour voir les bénéfices d’un tel projet. A moins que la forêt ait fait l’objet d’une protection depuis des générations. Negusse (propriétaire de Tamara Farm – Ethiopie) témoigne : « Ici dans la région de Kaffa, tout le monde prend soin de la forêt. Si l’un d’entre nous est surpris à couper un arbre, les anciens le condamnent à en replanter deux ». Et il n’envisage pas la production de ses cafés autrement que sous ombrage : « Mes investissements se concentrent sur l’implantation de nouvelles variétés d’arbres qui viendront protéger les caféiers ». Cette barrière naturelle et pieusement entretenue représente des enjeux multiples. C’est une manière de conserver une riche biodiversité, outre les bienfaits directs de ce bouclier naturel qui réduit la température du sol et de l’air sous la canopée. 

A terme, il convient de réduire drastiquement l’érosion des sols et surtout l’utilisation de fertilisants chimiques. Socialement, cet engagement en faveur des cafés de forêts (entre autres productions agricoles) replacent les femmes au centre du jeu, même dans les sociétés les plus excluantes. En effet, il est de notoriété publique « qu’elles sont les pionnières dans l’adoption des méthodes agro-forestières » pointe la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture). En tout cas, lorsqu’elles participent aux prises de décision…

 


A propos des cafés de forêts

Par la nature sauvage des cafés d’Ethiopie, le pays est un des exemples qu’il faut retenir concernant l’agro-foresterie. Des programmes de reboisement sont en cours un peu partout. Mais les effets vont prendre du temps à se manifester. Ce sont des décisions prises maintenant en faveur des générations futures.

L’agro-foresterie pour les cafés permet:

  • La réduction des inégalités entre les hommes et les femmes des régions productrices
  • Le développement et le renforcement de la biodiversité (faune et flore)
  • L’enrichissement des sols en nutriments divers
  • L’abandon de l’utilisation des fertilisants chimiques
  • La réduction de la température des sols et de l’air
  • La protection contre les fluctuations des températures sur les plants de café
  • La prévention de l’érosion des sols provoquée par les pluies (que le changement climatique génère)
  • La mise en place d’une alternative à la monoculture caféière en introduisant des variétés d’arbres qui permettent d’autres revenus agricoles
  • Améliorer l’ensemble des revenus des producteurs et leurs ouvriers